55-Bilan

Bilan.

A son retour de Tarbes, Abigail n’a pas voulu reprendre le tournage de l’émission. Labas n’a pas insisté. Il s’est débarrassé de Gabrielle Derien et a fait appel à une scripte plus efficace, ce qui ne fût pas bien difficile. Il comprend que sa fille a du chagrin. Il cherche à joindre son ex, la mère d’Abbie, mais celle-ci, trop absorbée par Greg et son projet australien, ne le rappelle pas.

La police ne peut toujours pas interroger Adrien et de ce fait, le couple ne peut pas approcher son fils. Abigail prend régulièrement des nouvelles et tient compagnie aux parents. Ils ne se parlent pas vraiment, ils sont juste dans l’attente, la journée passe comme ça, dans le vide, dans un espace-temps à part où les minutes, les heures, ont mille écho. Des gens circulent, entrent et sortent, et la nuit arrive avec la peur qui envahit les êtres fragiles lorsque l’obscurité se pose sur la rue, les maisons, les contours. Les jours passent au ralenti, dans une attente interminable.

Lorsqu’enfin l’état d’Adrien s’améliore, ses parents recommencent à respirer normalement. Alors Abbie leur raconte quelques anecdotes du tournage de l’émission, cela leur apporte beaucoup de joie et de bonne humeur. Et puis l’inspecteur peut s’entretenir avec Adrien qui raconte les mêmes faits que son père en omettant de préciser, comme lui, que Bicalène connaissait Gandeze mais en lui apprenant par contre, qu’il a effectivement retrouvé son frère. C’est difficile pour lui de prononcer les mots qui expliquent qu’il l’a laissé au fond d’une cave… L’inspecteur reconnaît que personne n’est en mesure de dire si Eddy fait partie des victimes ou non.

Adrien est enfin installé dans une chambre. Le chirurgien confirme aux Bicalène que leur fils n’aura pas de séquelles neurologiques et qu’il pourra d’ici quelques temps, après une bonne rééducation, se servir à nouveau de son bras.

L’émission avec Yvan Pervier ne marche pas, pourtant il est bon dans l’exercice. La personnalité d’Adrien étant déjà très appréciée, le public n’aime pas le voir remplacé et boude le programme qui avait si bien démarré. Quand le bruit se répand que le jeune animateur a été grièvement blessé dans une affaire trouble, alors qu’il était à la recherche de son frère jumeau, cela fait l’effet d’une bombe médiatique. La production reçoit alors une quantité incroyable de lettres de soutien, même d’amour, d’admiration, des messages très positifs et encourageants pour la suite. Ces derniers évènements sur la vie privée d’Adrien émeuvent son public mais éveillent aussi la curiosité et la sympathie de ceux qui ne le connaissaient pas. Des lettres de protestation affluent à la production de de Ponchartrain qui, devant la pression du public et avec l’accord de la chaîne, décide d’interrompre le tournage des émissions avec Yvan et d’attendre le retour d’Adrien.

A Evry les médias ont investi les lieux, des photographes se relaient devant l’entrée de l’hôpital, les journalistes harcèlent l’accueil, aucun appel n’est accepté pour Adrien Bicalène. Un contrôle s’est mis en place, une personne dans l’entourage médical ayant pris et vendu à plusieurs journaux, une photo d’Adrien quand il était inconscient dans la salle de réanimation, provoque un raz de marée faisant d’Adrien une victime héroïque et relançant le débat sur l’éthique. Sa côte de popularité déjà importante, se multiplie à la publication de cette photo. Le public réclame que les émissions déjà diffusées avec Adrien soient rediffusées ! De Ponchartrain comprend que finalement cet évènement néfaste ne va peut-être pas couler sa boîte.

Abigail passe rendre visite à Adrien un jour où, assommé par les antalgiques, il dort. Mathilde en profite pour aller acheter des affaires pour son fils. Abigail reste un long moment à le contempler, sa main posée sur la sienne, à calquer sa respiration paisible, à regarder sa poitrine se soulever, à s’imprégner de sa douleur, de son existence, de sa présence, mesurant toute la force de ses sentiments pour lui, désemparée, le cœur lourd avec le désir brûlant de poser ses lèvres sur les siennes. Au retour de Mathilde, elle repart, sans déranger personne. Elle laisse un petit bout de papier sur lequel elle écrit « Bon courage. Je t’embrasse. Abigail » Les quelques mots qu’elle lui murmura pendant son sommeil, ne furent pas entendus.

©lenferdudecor

56-Traitement

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